Conseils RH

Abandon de poste : quelles sont les règles applicables ?

6 mars 2023 par Alexandra Maftei - Lecture 5 min.
Abandon de poste

Il peut arriver qu’un de vos salariés ne se présente plus à son poste de travail. Sans nouvelle de lui, cette absence injustifiée peut potentiellement se transformer en abandon de poste. Face à cette situation, il peut paraître complexe d’agir en respectant la réglementation.

Qu’est-ce qui définit un abandon de poste ? Comment y faire face efficacement et quelle sanction pouvez-vous appliquer à votre salarié ?

Abandon de poste : définition et limites

L’abandon de poste suppose que votre salarié a quitté son emploi pendant les heures de travail de manière répétitive ou ne vienne pas travailler, sans vous informer. Toutefois, les conséquences de ce comportement sont différentes selon la gravité de la situation.

L’abandon de poste se manifeste par l’une des situations suivantes :

  • Une sortie du salarié non autorisée par l’employeur ;
  • Plusieurs absences injustifiées ou répétées pendant les heures de travail.

Cependant, le simple fait pour votre salarié de quitter brusquement son poste sans en justifier les raisons ou en demander votre accord n’est pas suffisant pour caractériser un abandon de poste.

Votre salarié dispose d’un délai de 48 heures pour vous avertir s’il s’agît par exemple d’un arrêt maladie. En tant qu’employeur, vous devrez donc attendre l’expiration de ce délai pour vous assurer qu’il ne s’agît pas d’un arrêt causé par l’état de santé de votre salarié. Pendant ce délai, il vous est recommandé d’essayer de prendre contact avec le salarié et son entourage pour en savoir plus sur sa situation.

De la même façon, un abandon de poste ne doit pas être confondu avec une absence injustifiée. En effet, l’abandon de poste peut résulter d’une absence injustifiée, mais l’inverse ne peut pas être le cas, notamment si le salarié reprend son poste à la suite de cette absence.

La procédure à appliquer

Après ce délai de 48h sans nouvelle de votre salarié qui ne se présente plus à son poste, vous pouvez, si aucun justificatif ne vous est parvenu, adresser une ou plusieurs lettres de mise en demeure au salarié. Cette lettre fera objet de demande au salarié de justifier au plus vite son absence et de reprendre immédiatement son poste.

Si votre salarié ne répond pas à sa mise en demeure et qu’il n’a toujours pas repris le travail, vous pouvez enclencher une procédure disciplinaire. Il est alors possible de sanctionner un abandon de poste par :

  • Une sanction disciplinaire, comme un blâme ou un avertissement ;
  • Un licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
  • Un licenciement pour faute grave.

Cette dernière option peut être établie si l’absence de votre salarié provoque une désorganisation dans votre entreprise ou que si celui-ci abonne son travail de manière délibérée alors que vous l’aviez mis en garde contre un départ prématuré.

Le licenciement pour abandon de poste n’est toutefois pas justifié si le salarié a quitté son poste sans autorisation pour se rendre à une consultation médicale justifiée par son état de santé, le décès d’un proche ou par l’exercice de son droit de retrait.

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Vous disposez d’un délai de 2 mois à compter de la prise de connaissance de l’absence de votre salarié pour engager une procédure disciplinaire contre lui.

Il est toutefois important de veiller à tenir compte des circonstances du départ du salarié et de ses conséquences avant de prononcer une sanction. Les fait doivent être appréciés au cas par cas pour choisir la sanction la plus adéquate.

Attention ! 
Si l’abandon de poste n’est finalement pas établi, le salarié peut vous réclamer des dommages-intérêts pour licenciement injustifié. Pour éviter ce risque, ne brûlez pas les étapes.

Dans des cas plus rares, si l’abandon de poste entraîne d’importantes répercussions sur votre entreprise, vous pouvez engager un contentieux à son encontre. Vous devrez alors apporter la preuve de l’existence des préjudices générés par cet abandon.

Un abandon de poste « présumant » une démission ?

Un amendement a été ajouté à la loi « Marché du travail » le 30 septembre 2022, proposant que « le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure […] est présumé démissionnaire. ».

L’objectif est d’instaurer une présomption simple de démission du salarié quand celui-ci quitte son poste volontairement. L’application de la présomption serait simplement conditionnée par une mise en demeure préalable de l’employeur à son salarié de reprendre son poste de travail.

Cet amendement impacte lourdement la définition de la démission, que ne saurait actuellement être présumée. Le salarié abandonnant son poste serait alors considéré comme démissionnaire, et de ce fait ne serait plus en droit de percevoir d’allocation chômage. Il conserverait toutefois la possibilité de renverser cette présomption de démission devant le Conseil des Prud’hommes.

Adopté le 5 octobre 2022, des modifications ont été apportées pour apporter des précisions en vue de son examen devant le Sénat. La nouvelle version de l’amendement précise que pour être présumé démissionnaire, le salarié doit avoir abandonné son poste ou « ne plus s’être présenté sur son lieu de travail sans en avoir informé son employeur », et ne pas avoir repris le travail dans un délai qui reste à définir par décret.

Toujours en attente d’un décret, il n’est pas encore possible d’appliquer la présomption de démission à un salarié abandonnant son poste. Le Ministère du Travail a tout de même précisé qu’une publication était prévue pour la fin du mois de mars 2023. Il sera possible d’utiliser la procédure de mise en demeure dès le lendemain de la publication au Journal Officiel du décret.

A savoir :
Il est probable que la présomption de démission ne s’applique pas aux salariés quittant leur poste pour des questions de santé ou de sécurité. Ce motif peut s’avérer légitime, et ainsi s’apparenter à une prise d’acte. Cette possibilité doit toutefois être déterminée par le décret à publier prochainement. 

Quelles conséquences pour un abandon de poste ?

Lorsqu’un cas d’abandon est constaté, votre salarié ne perçoit plus aucune rémunération jusqu’à la fin de la procédure de licenciement que vous avez éventuellement mis en place.

De plus, le salarié manquant à l’appel ne peut travailler au sein d’une autre entreprise au cours de la procédure de licenciement : il ne pourra s’inscrire à Pôle Emploi uniquement après la notification du licenciement.

Un abandon de poste prive également votre salarié d’indemnité de licenciement lorsque celui-ci est prononcé pour faute grave. Votre salarié conserve toutefois ses droits à l’allocation de retour à l’emploi.

La Loi « marché du travail » vient ajouter une présomption de démission en cas d’abandon de poste. Cet ajout impacte fortement les conséquences auxquelles s’expose le salarié qui abandonne son poste : considéré comme démissionnaire, le salarié n’aura plus droit aux allocations chômage.

Le salarié aura toutefois la possibilité de saisir le Conseil des Prud’hommes s’il souhaite contester la rupture de son contrat de travail, lui offrant ainsi la possibilité de renverser cette présomption de démission.

Le nouvel article du Code du Travail ajouté par le texte de loi prévoit un délai d’un mois pour que cette saisie soit jugée par le CPH. Cette information a suscité toutefois une certaine opposition, compte tenu de la longueur habituelle des délais d’audience du bureau de jugement du Conseil. C’est ici qu’une difficulté se crée, car le salarié ne peut bénéficier d’aucune indemnité chômage pendant ce délai. L’allonger rendrait la situation du salarié encore plus compliquée.

Rappel :
En cas d’abandon de poste par le salarié, l’employeur peut toujours procéder au licenciement pour faute, accordant le bénéfice des allocations d’assurances chômage au salarié ainsi licencié. 

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